« Comment devenir un centenaire en bonne santé ou l’art de bien vieillir »
Posté le 12/03/2020
« Comment devenir un centenaire en bonne santé ou l’art de bien vieillir »
Nathalie LE BRETON
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Au 1er janvier 2016, l’Institut Nationale d’Études Démographiques compte plus de 20000 centenaires en France, contre moins de 4000 dans les années 1990. C’est une belle progression de l’espérance de vie, mais qu’en est-il de l’état de santé de ces centenaires ? Actuellement il est difficile d’ouvrir un magasine sans être assailli par des publicités flattant les mérites de produits divers préservant la jeunesse de l’organisme. Crèmes de beauté, remèdes naturels, compléments ou alicaments : Selon le public visé, la tendance est de conserver la jeunesse ou de vieillir en santé. Mais qu’est ce que le vieillissement exactement ? Que signifie « vieillir » ? Qu’elles en sont les conséquences et comment bien vieillir ? Autant de questions auxquels nous proposons d’apporter quelques éléments de réponse.
L’être humain est bien placé dans la longévité des espèces vivant sur terre. Il vieillit - en âge - dès sa naissance, mais ne sera considéré comme « vieux » qu’après 65 ans. Le vieillissement est un processus naturel, universel et inévitable qui se caractérise à partir de l’âge adulte. Vieillissement ou sénescence désigne l’ensemble des processus physiques, physiologiques et psychologiques qui modifient l’organisme vers un ralentissement de l’activité vitale, amenant l’être vers sa mort naturelle. Souvent la sénescence est confondue avec le vieillissement pathologique. Ce dernier correspond à l’augmentation des maladies à travers le passage du temps. C’est pourquoi nous allons regarder dans un premier comment notre organisme vieillit.
D’un point de vue physiologique, le processus du vieillissement se traduit par l’altération des structures fonctionnelles du corps :
Au niveau cérébral, nous perdons 2% de notre masse cérébrale tous les 10 ans après notre puberté, mais les altérations sensibles perçues après 65 ans se visualisent par l’apparition de plaques séniles ou l’accumulation de petits filaments dans les neurones. Ces altérations diminuent notamment la capacité des neurones à faire de nouvelles connections. Ceci explique que le vieillissement puisse s’accompagner d’une baisse de performance mnésique et d’une diminution des fonctions cognitives : Concrètement, en vieillissant, l’homme perd petit à petit la capacité à s’adapter à son environnement.
Au niveau du système cardio-vasculaire, le processus est similaire. Les cellules du muscle cardiaque meurent et sont remplacés par des fibres non fonctionnelles. Notre précieux collagène (largement valorisé dans les spots publicitaires des crèmes de beauté) perd de son élasticité et se rigidifie. Nos artères et vaisseaux sanguins sont moins souples et n’arrivent plus à moduler une réponse adaptée à une grande variation de pression (durant un effort, suivant l’heure de la journée, selon l’état d’hydratation etc.). Il s’en suit l’apparition de varices, voir de gonflements.
Le vieillissement s’accompagne d’une augmentation de la masse grasse au détriment de la masse maigre (muscle). Naturellement, l’organisme augmente le catabolisme protéique musculaire tandis que diminuent ses capacités antagonistes à construire du muscle. Ainsi il y a moins de fibres musculaires au profit de fibres de collagènes (non contractiles). Il en résulte une diminution de la force musculaire, observée dès 45 ans, avec une perte de mobilité des articulations. La stabilité du squelette est fragilisée et le risque de chute augmente.
Vivre et vieillir, c’est aussi former des particules hautement réactives, appelées radicaux libres. Issue de la machinerie cellulaire pour la production d’énergie, les radicaux libres doivent être neutralisés avant qu’ils ne réagissent avec les enzymes du corps, ce qui leur donne un pouvoir dévastateur. L’organisme possède naturellement des mécanismes de défense, qu’il est nécessaire d’entretenir pour maintenir leurs performances.
D’une manière générale, le vieillissement pourrait se résumer par une altération physiologique des éléments fonctionnels avec remplacement par des constituants improductifs. Cette baisse de fonctionnalité affaiblit l’organisme, ce qui augmente le risque d’apparition de pathologies.
Ainsi les pathologies couramment rencontrées chez les personnes âgées ne sont pas le résultat direct du vieillissement mais bien les suites d’une susceptibilité accrue de contracter diverses maladies, touchant des systèmes rendus inefficaces. Citons par exemple la fragilisation des os qui augmente le risque d’ostéoporose, la proportion de masse grasse viscérale dans l’athérosclérose ou encore la quantité de plaques séniles impliquées dans la maladie d’Alzheimer. Ces pathologies sont maintenant bien connues du grand publique et une prévention est souvent mise en place par le médecin traitement à l’approche de la soixantaine.
Il est cependant plus rare d’entendre parler dans les cabinets des généralistes de malnutrition protéino-énergétique, alors que ses conséquences sont toutes aussi délétères. Comme nous l’avons vu précédemment, le métabolisme des protéines n’est plus équilibré passé un certain âge et l’alimentation doit pouvoir combler cet hypercatabolisme protéique. S’il est acquis que l’alimentation de la personne âgée et a fortiori celle du centenaire dépend directement de ses habitudes antérieures de vie et de son environnement socio-économique, il faut prendre en compte aussi des capacités masticatoires diminuées et une altération du goût avec l’inappétence qui en découle. Cette malnutrition protéino-énergétique peut vite se transformer en dénutrition réduisant encore les chances de vieillir en bonne santé : Augmentation de la morbidité, hausse de la fréquence d’hospitalisation, perte de mobilité qui se transforme en perte d’autonomie, provoquant l’isolement. Ainsi une mauvaise alimentation a sa part de responsabilité dans l’isolement des personnes âgées au même titre que les troubles urinaires, séniles et cognitifs habituellement mis en cause dans l’aspect psychologique du vieillissement.
Parce que le vieillissement ne s’accompagne pas seulement de désagréments physiologiques ou mécaniques, il faut aussi regarder l’état psychique des centenaires. Être centenaire ne se résume pas à avoir su limiter la susceptibilité aux maladies, mais aussi à avoir su garder l’envie de vivre. Bien que le vieillissement soit naturel et inévitable, il reste un processus anxiogène, accentué par une société qui refuse de le regarder en face. Ce rejet entraîne une marginalisation et un repli sur soi des personnes âgées. Mais alors, comment bien vieillir dans de telles conditions ?
Heureusement, la nature fournit tous les outils nécessaires pour vieillir en bonne santé. Cela commence dès maintenant par de petits gestes au quotidien :
Premièrement : Varier son alimentation, surtout quand le sentiment d’insipidité apparaît. Parce que la régulation nutritionnelle est plus lente chez la personne âgée, il est préférable d’avoir une grande variété d’aliments dans son assiette quotidienne : Variétés de couleurs, de goûts, de textures (adaptées !) C’est la diversité qui nourrit aussi bien le corps que l’esprit. On privilégie une majorité de fruits et légumes (la moitié de l’assiette !) afin d’apporter au corps les vitamines et minéraux nécessaires au bon fonctionnement de l’organisme. Parce qu’une simple supplémentation orale ne constitue pas toujours une solution appropriée, c’est bien dans l’aliment lui même que se trouve la réponse. La vitamine D associée au calcium des produits laitiers assure la solidité des os ; tandis que les minéraux retrouvés dans les légumes colorés donnent - en bonnes proportions - les munitions nécessaires (Cuivre, Sélénium, Zinc) à l’organisme pour se défendre contre les radicaux libres.
Manger des crudités n’est pas seulement un slogan de diététicien, mais bien l’assurance d’ingérer des vitamines E et C : Les antioxydants des antioxydants ! Ainsi le corps possède des atouts pour lutter contre le stress oxydatif.
Un apport protéique doit être présent à chaque repas sous la forme d’une viande, d’un poisson, d’œufs ou de produits laitiers, afin de maintenir la musculature.
Cependant une alimentation hyperprotéique ne suffit pas à assurer la force musculaire. C’est à travers l’activité physique que le corps vit. Il existe un nombre considérable d’études démontrant les bienfaits d’une pratique sportive quotidienne. Il ne s’agit pas de faire courir un marathon à des centenaires (bien que certains ont plus la forme que nos contemporains). Une utilisation douce et régulière des articulations et des muscles limitent en effet la calcification des rouages et la prépondérance de la masse grasse. La respiration - facilitée par l’exercice physique - améliore les échanges gazeux et réduit le sentiment de fatigue, souvent décrit par les personnes âgées.
Des moments de relaxation peuvent être proposés pour amener un état de détente. Ce relâchement sollicite tout de même le système musculaire mais aussi le système neurovégétatif. Il s’en suit un changement de nature somatique et psychologique. La relaxation chez la personne âgée lui permet aussi d’établir à nouveau une relation favorable avec son corps. Dans le même registre, on retrouve la pratique de la réflexologie plantaire.
Certes il existe bien des pratiques utiles pour vieillir en bonne santé, mais toutes s’avèrent infructueuses si le principal événement qui précède le passage au troisième âge n’a pas été savamment orchestré : La retraite.
Préparer sa retraite n’est pas aussi anodin qu’il paraît. Il ne s’agit pas de passer d’un état d’actif à l’état inactif mais bien de préparer une transition douce et équilibrée, d’un rythme de vie soutenu vers un rythme de vie physiologique. Ce passage est souvent mal vécu et certaines études soulignent une surmortalité des sujets dans les deux années qui suivent la retraite. Le changement de groupe social, la baisse de ressources, l’arrivée d’une plus grande liberté, …, tous ces facteurs sont autant de traumatismes subis par des personnes dont les dernières décennies ont été dictées par un rythme « métro-boulot-dodo ». La retraite s’accompagne de loisirs qui doivent continuer de remplir nos besoins selon la pyramide de Maslow. C’est bien à travers une distraction intellectuelle, associée à une activité physique dans un contexte social accueillant, que la vieillesse donne envie de vieillir… longtemps jusqu’à devenir centenaire.
Finalement pour devenir un centenaire, il faudrait accepter de bien vieillir chaque jour : Préparer sa vieillesse en adoptant des mesures hygiéno-diététiques et surtout en cultivant l’amour de la vie dès le plus jeune âge.
Nathalie LE BRETON
Bibliographie
Cahier de nutrition et de diététique, Avril 96
Cahier de nutrition et de diététique, Mai 97
L’hygiène alimentaire, B. RULLIER, Repères pratiques, Nathan
Manuel de préparation aux professions médicales et sociales, collection J. FIGARELLA
Le comportement du sujet âgé, Extrait du traité d’endocrinologie-nutrition (Elsevier, Paris), M.-F. Mathey, B.Lesourd.
Le vieillissement humain, Université Médicale Virtuelle Francophone, 2008-2009